L’Union Saint-Gilloise revient depuis peu sur le devant de la scène. Dans un passé assez lointain, c’était une place forte du football belge. Au point de participer à une tournée marathon à travers l’empire colonial du Plat Pays. Pour le peuple congolais, la tentation de jouer le match de l’indépendance est grande.
On a coutume, à tord, de réduire le déclenchement de la guerre des Balkans aux affrontements du stade Maksimir entre supporters du Dinamo et de l’Étoile Rouge. C’est un mythe qui a la peau dure. Dans un registre similaire, il se dit parfois que la tournée de l’Union Saint-Gilloise dans ce qui s’appelait encore le Congo belge a indirectement participé au déclenchement de la lutte pour l’indépendance. L’histoire est bien sûr beaucoup moins simpliste, même si le football a servi de décor à ces premiers soubresauts.
“L’Union au Congo”
C’est le 11 juin 1957 que l’Union Saint-Gilloise embarque à bord d’un avion de la Sabena pour rejoindre le Congo et sa capitale Léopoldville. Quelques semaines plus tôt, le club vient de terminer son championnat a une pale 9e place. Mais ça reste une des équipes les plus populaires du pays, et une imposante communauté unioniste réside au Congo. Un accueil royal est d’ailleurs réservé à la délégation de l’Union qui réside dans des hôtels de luxe et enchaîne les réceptions.
Au programme: sept matchs aux quatre coins de la colonie. La tournée de quinze jours de l’USG et ses nombreux internationaux commence par la capitale, Léopoldville. Pour leur premier match, les De Corte, Diricx, Close, Janssens, Van Rooy, Jacquemyns, Vandeweyer et consorts doivent y affronter une sélection dite “eurafricaine”, composée de joueurs européens et africains. C’est une formalité pour les Jaune et Bleu qui l’emportent 6 à 0.
Deux jours plus tard, l’opposition semble d’un tout autre calibre. Cette fois-ci, une sélection de joueurs africains de Léopoldville se présente. Le match en lui-même a une haute portée symbolique, et est enrobé d’un air de revanche sur l’oppression coloniale. Sur le terrain, les colonisés ont l’occasion de damer le pion des colonisateurs. Parmi les 60 000 personnes qui ont pris place dans les travées du Stade Roi Baudouin de Léopoldville, nombreux sont ceux qui en sont convaincus.
Contribution involontaire à l’indépendance du Congo
Sur le terrain, l’Union a beau mener au score, elle se fait secouer par les individualités de la sélection africaine. Leurs noms: Paul Bonga-Bonga, Raoul Lolinga, Lucien N’Dala et Max Mayunda. Des joueurs qui ne tarderont pas à attirer les convoitises des places fortes du championnat de Belgique. Un arbitrage pour le moins partial garantit finalement la victoire saint-gilloise 4-2. Mais, en tribune, ces décisions scandaleuses ne passent pas. Les supporters locaux sont excédés. A l’extérieur du stade, des émeutes éclatent. Le bilan fait état de 132 blessés, 50 voitures détériorées et 10 arrestations. Le retour des joueurs de l’USG vers leur hôtel se fait dans une ambiance hostile. Ils passent cependant vite à autre chose. Ils sont en effet attendus à Elisabethville (aujourd’hui Lubumbashi) pour y disputer un tournoi, avant de filer au Ruanda-Urundi.
Savaient-ils que l’Empire belge connaissait ses derniers mois? La petite histoire fait de ce qui s’est passé le 16 juin 1957 au sortir du Stade Roi Baudouin de Léopoldville – qui allait bientôt être renommée Kinshasa – la première émeute anti-coloniale. Une répétition générale avant les violents affrontements qui secoueront la capitale un an et demi plus tard, le 4 janvier 1959, enclenchant le processus qui mènera à l’indépendance du Congo de Patrice Lumumba et Joseph Kasa-Vubu.
(Source: USG)
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